Robert Ier de Vitré

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Robert de Vitré
Titre
Princeps de Vitré
v.
(25 ans)
Avec Hervé Ier
Prédécesseur Hervé Ier (seul)
Tristan (seigneur putatif)
Successeur André Ier
Seigneur de Marcillé
Av.
(25 ans)
Prédécesseur Tristan
Successeur André Ier
Biographie
Dynastie Famille de Vitré
Date de naissance
Date de décès
Lieu de décès Vitré
Père Tristan de Vitré
Conjoint Berthe de Craon
Berthe
Enfants André de Vitré
Résidence Château de Vitré

Robert Ier de Vitré

Robert Ier (vers 1034 † vers 1072) est seigneur de Marcillé de la mort de son père, Tristan, avant , jusqu'à la sienne. Miles, chevalier, visiblement très impliqué dans les luttes de pouvoir opposant Conan II de Bretagne à son oncle Éon Ier de Penthièvre, il aurait été récompensé en devenant gardien de la seigneurie de Vitré, faisant de lui le premier membre du lignage des Robert-André à s'implanter à Vitré. Il est parfois dit princeps ou châtelain supérieur puisqu'il doit partager le pouvoir avec son nouveau vassal Hervé Ier, issu d'une famille concurrente avec laquelle Robert et ses descendants ont entretenu des relations ambigües et parfois conflictuelles pendant plus d'un siècle. Il jette de fait les bases de la baronnie de Vitré comme pôle central d'un vaste territoire, s'étendant d'est en ouest d'Acigné jusqu'aux frontières du duché de Bretagne.

Biographie[modifier | modifier le code]

Un seigneur de Marcillé impliqué dans un important conflit régional[modifier | modifier le code]

Robert est le fils du seigneur Tristan de Marcillé et de son épouse, Innoguent de Fougères, dont l'existence est aujourd'hui contestée[1]. Seigneur de Marcillé, pagus minor du pays rennais, il est l'un des acteurs du conflit opposant Conan II de Bretagne à son oncle Éon Ier de Penthièvre entre et , même s'il est difficile d'appréhender avec exactitude le rôle qu'il y a joué. En effet, dans les actes, il apparaît tantôt aux côtés de l'un puis de l'autre au fur et à mesure des années. Ainsi, si, en , il semble être rallié à la cause d'Éon Ier lorsqu'il est indiqué comme témoin d'un acte de Main, puissant évêque de Rennes rival de Conan II, Robert entre en conflit direct avec Briant Ier de Châteaubriant, un des alliés principaux du comte de Penthièvre, alors désigné dans les textes comme « prince des Bretons » ou « duc de Bretagne ». De même, dans ce contexte de tensions, l'un des vassaux de Robert est fait prisonnier par des fidèles d'Éon, cause ou conséquence de son ralliement à Conan. En parallèle, Hervé Ier, seigneur, peut-être parmi d'autres tombés dans l'oubli, de Vitré, joue également un rôle prépondérant, mais principalement du côté princeps Britanniae dont il est l'un des principaux alliés encore en [2]. Pourtant, bien qu'en délicate situation, c'est Conan II qui l'emporte en en capturant son oncle ; il compte alors tant Hervé que Robert parmi ses fidèles, ce qui suppose ralliements et alliances ambigües plus ou moins tardifs de la part de l'un et et de l'autre. C'est dans ce contexte, probablement à la suite d'une décision d'un suzerain voulant remercier ou s'assurer du soutien d'un puissant vassal, que Robert apparaît comme « princeps et dominus castri » de Vitré. Celui-ci n'en est à ce titre pas son seul seigneur, Hervé restant toujours maître de ses possessions, mais son premier, son gardien, son « seigneur châtelain supérieur »[3]. La datation est incertaine mais Robert Ier apparaît comme « Vitriensium custode », gardien du Vitréais, dès , dans un acte de donation de l'église de Montautour à l'abbaye de Redon[4].

Ce serait donc en raison de son soutien, loin d'être indéfectible, à Conan II de Bretagne, que Robert aurait permis à ses descendants de tenir en fief ce qui est alors en train de devenir peu à peu la baronnie de Vitré. Cependant, une autre hypothèse, complémentaire, pourrait venir expliquer cette nomination. Ainsi, les réformes de l'Église débutées par le pape Léon IX ont contesté la mainmise dynastique de l'évêché de Rennes par Thébaud et ses descendants, auxquels Robert serait apparenté par sa grand-mère Junargonde[5]. Or, vraisemblablement en raison de cette parenté, Riwallon le Vicaire, époux de celle-ci, et leur fils Tristan ont tenu le rôle de vidame auprès de l'épiscopat. Avec la remise en cause de cette filiation héréditaire et la nomination de Main à Rennes, Robert n'a pas tenu le même office que ses ancêtres, élément peut-être compensé par la concession du fief de Vitré en sa faveur[3].

En 1066, Robert Ier combat sous les ordres de Guillaume le Conquérant, participant notamment à la bataille d'Hastings, le [6].

Le puissant gardien de Vitré[modifier | modifier le code]

Vestiges de la chapelle romane du château de Robert Ier à Vitré

Dans le cadre de l'opposition entre Conan II de Bretagne et Éon Ier de Penthièvre, ce serait également les tensions qui traversent le pays rennais en ce milieu de XIe siècle qui seraient à l'origine d'une recomposition du réseau castral. Ainsi, de même que se développent les forteresses de Pouancé et de La Guerche, dont Hervé de Martigné et Sylvestre de La Guerche deviennent respectivement les premiers seigneurs, est érigé par Robert Ier le premier château en pierre de Vitré, en remplacement du précédent, construit en bois par les Goranton-Hervé[3]. Le nouvel édifice s'établit en face de l'ancien, au sein d'un bourg appelé Sainte-Marie, du nom d'une église aujourd'hui connue sous le nom de Notre-Dame ; deux chapelles, Saint-Julien et Saint-Michel occupaient auparavant le site de la forteresse ; il ne reste que quelques vestiges de la première, à l'extrêmité de l'éperon rocheux[7]. Le site de Marcillé est, quant à lui, délaissé, probablement en raison des conflits opposant les comtes de Nantes à ceux de Rennes, tout en restant bien sous le contrôle du gardien, du custos, de Vitré. Ainsi, le bourg est alors dit situé « in territorio castri Vitriaci », c'est-à-dire dans la châtellenie de Vitré[8]. Le porche roman de la forteresse de Robert Ier existe encore aujourd'hui.

En quête de contrôle sur Vitré, Robert Ier aurait eu du mal à asseoir sa mainmise sur les nombreuses institutions religieuses de la ville, alors divisée en plusieurs bourgs distincts. Il cherche en ce sens à se donner des alliés nouveaux, en l'occurrence les influents moines de Marmoutier, dont un certain Urvodius, qui se voient donner par lui le site du vieux château de bois des Goranton-Hervé, situé de l'autre côté de la Vilaine. Il y fonde, vers 1064-1076, en présence de l'évêque de Rennes Main et de l'abbé Barthélémy, un prieuré de douze moines, communauté digne d'une véritable abbaye même s'il est incertain qu'elle est un jour été au complet[7],[9]. C'est alors tout un bourg, nommé Sainte-Croix du nom du vocable du prieuré, qui se constitue derrière l'ancienne enceinte, face à Sainte-Marie[10]. Les deux ensembles restent néanmoins intimement liés puisque, là où Robert Ier siège à Sainte-Marie même depuis le château qu'il vient d'ériger, ce sont des parents qui sont prieurs de Sainte-Croix, à l'image d'un certain Riwallon, domus attesté vers 1090-1106, dont le prénom, identique au plus vieil ancêtre connu de la famille, est signe d'une certaine filiation[8]. Les moines, en plus de celui de Sainte-Croix, ont choisi un autre vocable, celui de Saint-Blaise, qui fait référence à Blaise de Sébaste, évêque du IVe siècle très populaire à l'époque carolingienne. De même, y est vraisemblablement accolée une chapelle Saint-Sauveur, invocation ancienne au XIe siècle déjà. Enfin, le nom des foires du bourg faisant référence à saint Blaise, il est probable que Sainte-Croix ait été de fait bien antérieure à la fondation du prieuré en lui-même et qu'il remonterait à un hypothétique monastère carolingien abandonné et reconstruit comme château des Goranton-Hervé. Dès lors, Robert Ier se serait tout autant assuré le contrôle de Sainte-Croix, appelée Vieux-Bourg, que de Sainte-Marie[note 1], en y construisant son nouveau château[7]. Il bénéficie désormais d'une véritable aura spirituelle, en plus d'être un puissant seigneur autonome du pouvoir comtal[4].

Robert Ier est un seigneur puissant. Vingt-quatre ou vinqt-cinq mottes sont tenues par ses vassaux. Parmi eux, en plus des chevaliers de Cornillé, de Landavran et des autres fiefs environnants, se trouve Hervé Ier, qui agit en tant que co-seigneur puisqu'il continue à participer à la perception des coutumes et tonlieux de la baronnie de Vitré, droit qu'il possédait déjà du temps où il était seul en son château. Il reste néanmoins subordonné à Robert Ier, le princeps, qui doit faire face successivement à Guy Ier puis à Hamon de Laval , qui interviennent régulièrement aux confins de ses terres, à Bréal et dans la forêt du Pertre notamment[3],[8].

Union et postérité[modifier | modifier le code]

Il épouse vers 1051 Berthe de Craon, fille de Garin, seigneur de Craon, avec qui il a une fille[5],[11] :

De secondes noces avec une autre Berthe méconnue, il a quatre fils[5] :

Il pourrait vraisemblablement avoir un autre fils, Riwallon ; époux d'une fille anonyme d'Hervé Ier de Vitré, il peut être celui qui est prieur de Sainte-Croix à Vitré entre 1090 et 1106[4],[8]. À la suite d'un accord conclu avec Guy II de Laval, ce religieux à la filiation incertaine fonde Mondevert aux marges des baronnies de Vitré et de Laval[9].

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Le bourg Sainte-Marie, c'est-à-dire le coeur de Vitré, a par la suite, en 1209, également été dénommé Vieux-Bourg.

Références[modifier | modifier le code]

  1. Daniel Pichot, Valérie Lagier et Gwenolé Allain, Vitré, Histoire et Patrimoine d'une Ville, Somogy Éditions d'Art, Vitré, avril 2009, 296 p. (ISBN 978-2-7572-0207-4), p.27.
  2. Stéphane Morin, De la noblesse de Bretagne au XIe siècle : une noblesse "bretonne" ?, ARSSAT, Rennes, décembre 2005, 11 p.
  3. a b c et d Daniel Pichot, Valérie Lagier et Gwenolé Allain, op.cit p.23-24
  4. a b et c André Chédeville et Daniel Pichot (dir.), Des Villes à l'ombre des châteaux. Naissance et essor des agglomérations castrales en France au Moyen Âge, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, coll. « Archéologie & Culture », 2010, 239 p. (ISBN 978-2-7535-1144-6), p. 17-19
  5. a b et c Michel Brand'Honneur Manoirs et châteaux dans le comté de Rennes (XIe – XIIe siècles)' PUR Rennes (2001) (ISBN 2 86847 5612) tableau 33 p. 290.
  6. Wace cite le sire de Vitrie dans le roman de Rou, aux vers 13 604 et 13 605.
  7. a b et c Daniel Pichot, Valérie Lagier et Gwenolé Allain, op.cit p.31-32
  8. a b c et d Daniel Pichot, Vitré Xe – XIIIe siècle. Naissance d'une ville, PUR, Rennes, 2006, 28 p., p.10-17
  9. a et b Daniel Pichot, « Les prieurés bretons de Marmoutier (XIe – XIIe siècle) », dans Bruno Judic et Christine Bousquet-Labouérie (dir.) Les abbayes martiniennes, PUR, coll. « Annales de Bretagnes et des Pays de l'Ouest », Rennes, 2012, 203 p., (ISBN 978-2-7535-2134-6) p.153-175
  10. Patrice Forget Un Prieuré-bourg breton : Sainte-Croix de Vitré, 1060-1789, MemHOuest, 1963
  11. Frédéric Morvan Les Chevaliers bretons. Entre Plantagenets et Capétiens du milieu XIIe au milieu du XIIIe siècle éditions Coop Breizh, Spézet 2014 (ISBN 9782843466700) « Généalogie des Vitré » p. 290.

Bibliographie[modifier | modifier le code]