Pierre III (empereur de Russie)

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
(Redirigé depuis Pierre III de Russie)

Pierre III
Пётр III
Illustration.
Pierre III, par Lukas Konrad Pfandzelt.
Titre
Empereur de Russie

(6 mois et 4 jours)
Couronnement Non couronné
Prédécesseur Élisabeth Ire
Successeur Catherine II
Duc de Holstein-Gottorp

(23 ans et 29 jours)
Prédécesseur Charles-Frédéric de Holstein-Gottorp
Successeur Pavel Petrovitch Romanov
Biographie
Dynastie Maison de Holstein-Gottorp
Maison Romanov
Nom de naissance Karl Peter Ulrich von Schleswig-Holstein-Gottorf
Date de naissance
Lieu de naissance Kiel (duché de Holstein)
Date de décès (à 34 ans)
Lieu de décès Ropcha (Empire russe)
Sépulture Cathédrale Pierre-et-Paul à Saint-Pétersbourg
Père Charles Frédéric de Holstein-Gottorp
Mère Anna Petrovna de Russie
Conjoint Catherine II de Russie
Enfants Paul Ier de Russie
Religion Luthéranisme puis Chrétien orthodoxe russe

Signature de Pierre IIIПётр III

Pierre III (empereur de Russie)
Monarques de Russie
Duc de Holstein-Gottorp

Pierre III Fiodorovitch (en russe : Пётр III Фёдорович, Piotr III Fiodorovitch), né Karl Peter Ulrich de Holstein-Gottorp le à Kiel et mort le 6 juillet 1762 ( dans le calendrier grégorien) à Ropcha, est un empereur de Russie.

Duc de Holstein-Gottorp depuis 1739, Pierre III règne six mois sur l'Empire russe du au avant d'être renversé par son épouse Catherine II. Il est assassiné quelques jours plus tard.

Il est le premier souverain russe de la branche de Holstein-Gottorp, qui reprend le nom de Romanov et règne sur l'Empire russe[1] jusqu'en 1762 et le coup d'État de sa femme.

Jeunesse[modifier | modifier le code]

La mère de Pierre, Anna Petrovna de Russie, meurt le , quelques jours après sa naissance. Son père, Charles-Frédéric de Holstein-Gottorp, lui impose, dès l'âge de sept ans, une éducation strictement militaire.

À la mort de Charles-Frédéric, en juin 1739, il est confié à la garde de son oncle Adolphe-Frédéric de Holstein, prince-évêque de Lübeck, qui abandonne son éducation au Suédois Brummer, maréchal de la cour, qui l'élève à la dure, de manière cruelle. Afin de l'inciter à étudier, il le prive des jours entiers de nourriture et l'oblige à regarder ses serviteurs prendre leur repas devant lui. Pierre le détestait[2]. Catherine II rapporte dans ses Mémoires que Pierre avait pris très jeune l'habitude de s'enivrer. Elle précise que le fait était connu de tous dès leur première rencontre, à Eutin, alors que Pierre a seulement onze ans[3].

Mariage[modifier | modifier le code]

En 1742, Élisabeth Petrovna, sœur de sa mère et nouvelle impératrice de Russie, le fait mander à Saint-Pétersbourg, car elle veut en faire son héritier. Pierre s'ennuie vite de Kiel et déteste sa nouvelle patrie. Son enfance trop dure a fait de lui un personnage instable. L'un de ses loisirs est de torturer des chiens et des chats et de s'amuser des réactions horrifiées de sa femme et de ses courtisans. La variole, qu'il attrape en 1744, n'améliore pas les choses.

Le , Élisabeth le marie à sa cousine Sophie d'Anhalt-Zerbst, qui a pris le nom de Catherine en se convertissant à la foi orthodoxe. La princesse accepte le mariage malgré sa répugnance pour son époux, car elle est ambitieuse et espère devenir un jour impératrice de Russie.

En 1754, après 9 ans de mariage naît enfin un fils, Paul Petrovitch. Il est possible que cet enfant ne soit pas le fils du grand-duc héritier, mais de Sergei Saltykov, l'un des amants de Catherine, qui aurait pu être présenté à la grande-duchesse par l'entremise secrète d'Élisabeth elle-même, soucieuse de voir naître un héritier. La filiation douteuse de l'héritier trouve en tout cas des échos jusque dans la correspondance diplomatique[4].

En 1756, la Russie déclare la guerre à la Prusse. C'est la guerre de Sept Ans. Pierre, dont l'idole est Frédéric II de Prusse et qui désire à tout prix le voir victorieux, profite de sa présence au conseil de guerre pour lui communiquer en secret les plans de guerre de l'armée russe. Les généraux et les soldats russes se doutent de ses manigances et commencent à le tenir en aversion. Certains le surnomment même l'« Allemand », du fait de ses origines et de ses affinités.

À la même époque, Pierre devient l'amant d'Élisabeth Romanovna Vorontsova (en) (1739-1792), que sa famille voudrait bien voir remplacer Catherine comme épouse du futur empereur[4]. De son côté, Catherine se fait aussi des alliés, parmi lesquels le ministre Nikita Ivanovitch Panine et les frères Orlov, dont le cadet, Grigori, est son amant.

Empereur de Russie[modifier | modifier le code]

Une lettre (en français) de Pierre à son épouse.

L'impératrice Élisabeth décède le 25 décembre 1761 ( dans le calendrier grégorien) alors que ses armées assiègent Berlin et que, pour la première fois, la Russie s'est imposée comme une puissance européenne majeure. Frédéric II de Prusse, complètement vaincu, songe au suicide[5] et la Prusse s'attend à être partagée entre les vainqueurs.

Pierre III est un admirateur de Frédéric II et aussitôt devenu empereur, il met fin à cette guerre victorieuse : tous les territoires conquis sont évacués et rendus sans contrepartie au roi de Prusse[6], au grand dam de l'armée russe. Le 5 mai, un traité de paix est signé. Pierre promet alors de se joindre à Frédéric dans sa guerre contre l'Autriche.

En quelques mois, Pierre se fait détester de tous ceux qui pourraient lui être favorables à la cour de Russie. Un premier oukase oblige l'armée à se vêtir d'uniformes prussiens. Un second oblige les popes à se couper la barbe[7] et à s'habiller comme des pasteurs protestants. Les icônes sont enlevées des églises et les biens du clergé orthodoxe sont confisqués.

Un dernier oukase contente une partie de la noblesse car il met fin au service militaire perpétuel de cette classe en vigueur depuis Pierre le Grand. Désormais, les nobles ne sont plus obligés de servir l'État, sauf en temps de guerre. Les empereurs suivants n'oseront pas abroger ce dernier oukase.

Pierre III a été initié en franc-maçonnerie, il aurait fait don d’une maison, en 1762, à la loge "À la Constance", et aurait tenu des conférences maçonniques dans son château d’Oranienbaum[8].

Coup d'État et mort[modifier | modifier le code]

Tombeau de Pierre III[9].

Au printemps 1762, Pierre III s'apprête à déclarer la guerre au Danemark afin de s'emparer du duché de Schleswig et l'annexer à son duché de Holstein. Il assigne Catherine au palais de Peterhof et part rejoindre ses troupes à Kronstadt.

Catherine II, qui se sent menacée[10], décide le 28 juin 1762 ( dans le calendrier grégorien) de prendre le pouvoir par la force et de renverser son époux[11], avec l'aide de Nikita Panine et des frères Orlov. Ceux-ci soudoient une centaine de soldats des régiments Préobrajenski et Ismaïlovski, qui servent d'escorte à Catherine dans sa marche sur Saint-Pétersbourg. Après quelques hésitations, les autres régiments se joignent à eux. À son arrivée dans la capitale, Catherine est accueillie triomphalement et reconnue par le clergé et le Sénat.

Lorsqu'il apprend le coup d'État, Pierre III s'effondre. Lâché par l'armée et la flotte de Kronstadt, il est arrêté et assigné à résidence à Ropcha, où on l'oblige à signer son acte d'abdication. Le , il est assassiné dans des circonstances troubles par Alexeï Orlov et ses gardiens.

Cette fin mystérieuse donnera naissance à de nombreuses légendes. Le cosaque Emelian Pougatchev, meneur de la dernière grande insurrection paysanne en Russie, de 1773 à 1774, prétendra être Pierre III en guerre contre Catherine II, l'usurpatrice allemande. Il en fut de même de Kondratiy Selivanov, fondateur de la secte des Scoptes.

Généalogie[modifier | modifier le code]

Pierre III appartient à la première branche de la maison d'Oldenbourg-Russie (maison Holstein-Gottorp-Romanov) issue de la première branche de la maison de Holstein-Gottorp, elle-même issue de la première branche de la maison d'Oldenbourg.

Distinctions[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Les « Romanov » règnent sur l'Empire russe jusqu'en 1917.
  2. Selon Les Mémoires de Catherine II, écrits par elle-même, (préfacés par Alexandre Herzen, Lire en ligne
  3. Mémoires de Catherine II, p. 3
  4. a et b Hélène Carrère d'Encausse 2002, p. 43.
  5. « Peu optimiste, Frédéric confie plus tard qu'il a songé à se suicider après la bataille de Kunersdorf où il a manqué d'être fait prisonnier. » In Jérôme Hélie, Les Relations internationales dans l'Europe moderne,
  6. Riasanovsky 1994, p. 278.
  7. La question de la barbe du clergé est vivace en Russie depuis Pierre le Grand. En 1757, Mikhaïl Lomonosov avait consacré un poème satirique (anonyme) au sujet, l'Hymne à la barbe.
  8. Tatiana Bakounine, Répertoire biographique des Francs-Maçons Russes, Institut d'Études slaves de l'Université de Paris, 1967, Paris, p. 404.
  9. La plaque de bronze porte l'inscription Пeтръ III. Il s'agit de l'orthographe antérieure à la réforme orthographique du russe de 1918, la lettre finale étant un signe dur.
  10. Jean des Cars, Saint-Pétersbourg, sur les pas des Tsars, Perrin, (ISBN 2-262-02067-1), p. 46
  11. Michel Heller : Histoire de la Russie et de son Empire chap.2-9; 2015, Éd. Tempus Perrin, (ISBN 978-2262051631)

Annexes[modifier | modifier le code]

Sur les autres projets Wikimedia :

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Document utilisé pour la rédaction de l’article : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • Jérôme Hélie, Les Relations internationales dans l'Europe Moderne 1453-1789, Armand Colin, 2008.

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]