Conan IV de Bretagne

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Conan IV
Illustration.
Sceau de Conan IV de Bretagne selon Dom Morice.
Titre
Duc de Bretagne
1166 ou 1167
Prédécesseur Eudon de Porhoët (régent)
Successeur Constance de Bretagne
Comte de Richmond

(25 ans)
Monarque Conan IV de Bretagne
Prédécesseur Alain le Noir
Successeur Constance de Bretagne
Biographie
Titre complet Duc de Bretagne
Comte de Richmond
Dynastie Maison de Penthièvre
Date de naissance entre 1135 et 1138
Date de décès
Sépulture Abbaye de Bégard
Père Alain le Noir
Mère Berthe de Bretagne
Conjoint Marguerite de Huntingdon
Enfants Constance de Bretagne Couronne héraldique (3 branches trilobées)
Guillaume
p.-ê. Marguerite[note 1],[1],[2]
Duc de Bretagne

Conan IV dit le Petit (né vers et mort le ), fils d'Alain le Noir, seigneur de Guingamp et comte de Richmond, et de la duchesse Berthe de Bretagne, fille du duc Conan III, fut comte de Richmond de 1146 à 1171 et duc de Bretagne de 1156 à 1166 ou 1167.

Biographie[modifier | modifier le code]

Jeunesse[modifier | modifier le code]

Conan, né vers 1135, est mineur lorsque son père meurt en 1146, ses droits à l'« Honneur de Richmond »[3] sont reconnus pour la première fois « dans l'année où la paix a été conclue entre Étienne roi d'Angleterre et Henri, comte de Normandie [c'est-à-dire, ] quand par la grâce des dits roi et comte l'héritage de mes parents m'est restauré », comme le reconnaît sa première charte connue. Ce document est un rare souvenir d'instance de l'exécution de l'accord à l'amiable conclu à Winchester entre le roi Étienne d'Angleterre et Henri. Le fait que dans cet acte Conan soit nommé « comte de Richmond », indique que sa situation en Bretagne était incertaine[4].

Duc de Bretagne[modifier | modifier le code]

En 1148, son grand-père Conan III avait désigné Conan comme son héritier sous la régence d'Eudon de Porhoët, second mari de Berthe, déshéritant pour cause d'illégitimité supposée, son fils Hoël qui refuse la sentence. Hoël III se proclame son successeur, mais défait par Eudon, il doit se contenter du comté de Nantes. À l'âge de la majorité, Conan IV se révolte contre son beau-père qui refuse de lui laisser les rênes du duché. Il s'allie à Hoël mais ils sont battus par Eudon en 1154. Conan se réfugie en Angleterre auprès d'Henri II Plantagenêt qui lui confirme la possession du titre et de l'Honneur de Richmond, hérité de son père[5]

Conan reçoit une aide militaire anglaise qui lui permet de revenir en Bretagne et de rallier plusieurs féodaux, mais sa position de vassal du roi d'Angleterre provoque une révolte des seigneurs bretons sous la conduite d'Eudon de Porhoët. Ce dernier, battu, se réfugie hors de Bretagne. Conan IV est proclamé duc en 1156, mais cette même année, les Nantais chassent son oncle Hoël et choisissent pour comte le frère cadet d'Henri II, Geoffroy Plantagenêt, déjà comte du Maine et d'Anjou depuis 1156[6].

Le comté de Nantes[modifier | modifier le code]

Quand Geoffroy d'Anjou, comte de Nantes, meurt en , Conan IV se saisit immédiatement du comté. C'est la seule fois où il s'oppose frontalement à Henri II, qui réplique en confisquant temporairement l'« Honneur de Richemond » et en débarquant en France, où Conan se hâte d'aller se soumettre à Avranches le jour de la Saint-Michel en et de lui rendre le comté de Nantes. Il ne fera plus preuve que de peu d'opposition par la suite. Il est certain que son mariage avec Marguerite de Huntingdon, sœur du roi des Scots Malcolm IV, en 1160, a été approuvé sinon arrangé par Henri II lui-même. Conan IV réside alors beaucoup en Angleterre entre 1156 et 1164[7].

Conan IV de Bretagne, duc de Bretagne, va en compagnie de Geoffroi évêque de Saint-Brieuc ; d'Henri II, roi d'Angleterre; et de Guillaume Ier, abbé de Saint-Aubin des Bois; Guillaume, abbé de Saint-Serge, Hugues, abbé de Saint-Nicolas d'Angers, Guillaume, abbé de Saint-Maur ; Guillaume, abbé de Toussaint d'Angers, assister à la translation du corps de saint Brieuc dans l'abbaye Saint-Serge-lès-Angers[8]

Révoltes[modifier | modifier le code]

Eudon de Porhoët mène une nouvelle révolte qui remporte des succès, mais offre ainsi à Henri II le prétexte[9] pour intervenir en Bretagne avec une armée qui prend Josselin en 1168. Henri II dépouille Eudon de Porhoët du Porhoët, puis, après une dernière révolte en 1173, du comté de Penthièvre.

Henri II ne tolère plus de désordre dans le duché, en particulier les nuisances apportées au commerce maritime entre ses différentes possessions (au Nord et au Sud de la Bretagne) par les naufrageurs abusant du droit de bris[10].

Dans l'intervalle un conflit avec son oncle, Henri, comte de Trégor, permet à Conan IV de confisquer à ce dernier le comté de Guingamp[11], qui à la fin de la décennie 1160 devient le centre principal de son pouvoir : beaucoup de ses chartes subsistantes ont été scellées dans cette cité plus que partout ailleurs. Mais les révoltes des féodaux bretons se poursuivent ; elles impliquent Jean II de Dol-Combourg, Raoul II de Fougères qui voit son château rasé, et Guyomarch IV de Léon, ainsi que les intriques persistantes de son ex beau-père, Eudon de Porhoët ; ces événements affaiblissent encore son pouvoir et altèrent probablement sa santé[4].

Abdication et mort[modifier | modifier le code]

Le , Conan IV se trouve avec Henri II à Angers lors de la « translation » du corps de Saint Brieuc[12] de l'abbaye Saint Serge & Bacchus[13]. C'est à cette occasion que finalement Conan accepte officiellement de fiancer sa fille et héritière Constance âgée de 5 ans, au quatrième fils d'Henri II, Geoffroy, âgé de 8 ans, et à lui laisser l'administration de la Bretagne afin d'obtenir plus d'aide contre ses ennemis. Il ne conserve sous son contrôle personnel que Guingamp et quelques domaines dans le diocèse de Quimper[14], ainsi que l'Honneur de Richmond.

Avec son épouse Conan continue la tradition familiale d'être un bienfaiteur d'abbayes, spécialement bretonnes, comme Saint Melaine de Rennes, Saint Georges de Rennes, Bégard, Saint Sulpice-des-Bois, et Sainte Croix de Quimperlé. Le prieuré de Sainte Croix de Guingamp reçoit également des donations de Conan et de Marguerite, pendant qu'il fonde pour les cisterciens l'Abbaye Saint-Maurice de Carnoët en 1170[15] et reste en étroites relations avec les moines de l'Abbaye du Mont-Saint-Michel et de Savigny[4].

Il rencontre à l'occasion Henri II avec qui il est à Angers de nouveau le et probablement à Avranches en 1170, mais le pouvoir réel en Bretagne est exercé par Henri II plusieurs années avant la mort de Conan le , quand sa fille Constance devient duchesse titulaire[4].

Sa veuve se remarie avec Humphrey (III) de Bohun, connétable d'Angleterre, et à sa mort en 1201 elle est inhumée à l'Abbaye de Sawtry, dans le Huntingdonshire. Conan avait quant à lui été inhumé dans l'Abbaye de Bégard[16].

Union et descendance[modifier | modifier le code]

De son union avec Marguerite de Huntingdon naissent :

Représentation en littérature[modifier | modifier le code]

Conan est généralement décrit comme un duc faible, incapable de protéger le duché contre le puissant roi angevin dans l'historiographie bretonne[19], mais l'historien Eric Borgnis-Desbordes a récemment nuancé cette opinion[20].

Conan IV est mentionné dans la tragédie Jean sans Terre ou la mort d’Arthur (1791) de Jean-François Ducis, les romans Time and Chance (2002), Prince of Darkness (2005) et Devil’s Brood (2008) de Sharon Kay Penman (en), et le deuxième volume de la trilogie Le Château des Poulfenc (2009) de Brigitte Coppin.

Ascendance[modifier | modifier le code]

Article connexe[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. a et b Marguerite de Huntingdon pourrait avoir eu une autre fille, prénommée elle aussi Marguerite, qui épousa Pedro Manrique de Lara en 1183. Selon les théories, cette deuxième Marguerite pourrait être la fille de Conan IV ou d'Humphrey de Bohun.
  2. Marguerite de Huntingdon fit une donation pour le repos de son âme et de celles du Duc Conan IV et de « nos garçons », ou « nos enfants » (pro salute animepuerorumnostrorum). Selon les historiens Everard et Jones, il semblerait que ce soit une référence à au moins un fils qui serait mort en bas âge, faisant de Constance l'unique héritière du Duché de Bretagne en 1166. (d'après Everard et Jones, The Charters of Duchess Constance and Her Family (1171-1221), p. 94).
  3. Deux actes faits par Constance et son fils Arthur vers 1200 mentionnent un frère de Constance, Guillaume « clericus ». En tant que garçon, Guillaume aurait dû hériter du duché après Conan. D’après Everard, le fait que Henri II ait forcé le père de Constance à abdiquer en 1166 avait pour but d’empêcher tout fils du duc d’hériter du duché. Selon elle, le fait que le frère de Constance s’appelle Guillaume semble indiquer qu’il n’était pas un fils illégitime de Conan IV, puisque Guillaume était le prénom de l’un des frères de Marguerite de Huntingdon. (Everard, Judith (2000). Brittany and the Angevins: Province and Empire, 1158-1203. Cambridge University Press, 2000, p. 43).

Références[modifier | modifier le code]

  1. a b et c Chaillou, Léa (2017). On Constance of Brittany's Family. Foundations volume 9, 2017, Foundation for Medieval Genealogy, p. 35-46.
  2. a et b Margaret de Bohun sur le projet Medieval Lands.
  3. Cet « honneur » consiste en un ensemble de terres et de revenus dans le Yorkshire.
  4. a b c et d (en) Michael Jones « Conan (IV), duke of Brittany (c.1135–1171) », Oxford Dictionary of National Biography, Oxford University Press, 2004.
  5. André Chédeville et Noël-Yves Tonnerre La Bretagne féodale XIe – XIIIe siècle. Ouest-France Université Rennes (1987) (ISBN 9782737300141) p. 84-85.
  6. André Chédeville et Noël-Yves Tonnerre op. cit. p. 86.
  7. André Chédeville et Noël-Yves Tonnerre op. cit. p. 86-87.
  8. Dom Morice et Dom Taillandier, Histoire ecclésiastique et civile de Bretagne…, , Paris, 1756, t. II, pp. lxviij-lxix.
  9. De nombreux troubles ayant éclaté dans plusieurs de ses fiefs continentaux (Normandie, Maine…), Henri II décide de se déplacer en personne remettre de l'ordre dans ses territoires.
  10. Judith Everard. « Le duché de Bretagne et la politique Plantagenêt aux XIIe et XIIIe siècles », in Marin Aurell et Noël-Yves Tonnerre éditeurs. Plantagenêts et Capétiens, confrontations et héritages, colloque des -, Poitiers. Brepols, 2006, Turnhout. Collection Histoires de famille. La parenté au Moyen Âge. (ISBN 2-503-52290-4), p. 202.
  11. Stéphane Morin Trégor, Goëlo, Penthièvre. Le pouvoir des Comtes de Bretagne du XIe au XIIIe siècle Presses Universitaires de Rennes & Société d'émulation des Côtes-d'Armor. Rennes 2010 (ISBN 9782753510128) p. 175.
  12. Qui ne reviendra finalement à Saint-Brieuc qu'en 1210.
  13. Stéphane Morin Trégor, Goëlo, Penthièvre. Le pouvoir des Comtes de Bretagne du XIe au XIIIe siècle Presses Universitaires de Rennes & Société d'émulation des Côtes-d'Armor. Rennes 2010 (ISBN 9782753510128) p. 298-299.
  14. André Chédeville et Noël-Yves Tonnerre op. cit. p. 88.
  15. Les Abbayes Bretonnes, ouvrage collectif publié par la Biennale des Abbayes Bretonnes B.A.B & Fayard (ISBN 9782213013138) p. 405.
  16. Les Abbayes Bretonnes, op. cit. p. 342.
  17. Judith Everard et Michael Jones, The Charters of Duchess Constance and Her Family (1171-1221), p.  93-94.
  18. Judith Everard (2000). Brittany and the Angevins: Province and Empire, 1158-1203. Cambridge University Press, 2000, p. 43.
  19. Arthur Le Moyne de La Borderie, Histoire de Bretagne III, (Rennes, 1894), 273.
  20. Eric Borgnis-Desbordes, Constance de Bretagne (1161-1201), Une duchesse face à Richard Cœur-de-Lion et Jean san Terre, (Yorann Embanner, 2019).

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Stéphane Morin Trégor, Goëlo, Penthièvre. Le pouvoir des Comtes de Bretagne du XIe au XIIIe siècle Presses Universitaires de Rennes & Société d'émulation des Côtes-d'Armor. Rennes 2010 (ISBN 9782753510128).
  • Léa Chaillou (2017). « On Constance of Brittany's Family ». Foundations vol. 9, 2017, Foundation for Medieval Genealogy, p. 35-46.
  • André Chédeville et Noël-Yves Tonnerre La Bretagne féodale XIe – XIIIe siècle. Ouest-France Université Rennes (1987) (ISBN 9782737300141).
  • (en) Brittany and the Angevins: Province and Empire, 1158-1203, edited by Judith Everard; Cambridge University Press, 2000.
  • Étienne Gasche, Petite histoire des Rois et Ducs de Bretagne, éditions Yoran Embanner, 2006, (ISBN 2-9521446-7-2)
  • (en) The Charters of Duchess Constance of Brittany and her Family (1171-1221), edited by Judith Everard and Michael Jones ; Woodbridge, the Boydell Press, 1999, XXX+217 p., pl. ("Collected here for the first time are the acts of Duchess Constance (1171-1201), her mother, dowager-duchess Margaret of Scotland, Constance's three husbands, and her three children. The subject matter concerns not only Brittany, but also the Breton rulers' extensive lands in England, the Honour of Richmond, and even the countries of Anjou, Maine & Touraine. The charters also cast light on the political power of female rulers") (ISBN 0-85115-751-3)
  • (en) Michael Jones « Conan (IV), duke of Brittany (c.1135–1171) », Oxford Dictionary of National Biography, Oxford University Press, 2004.
  • Arthur Le Moyne de La Borderie, Histoire de Bretagne, t. 3 : 995-1364, Rennes / Paris, J. Plihon et L. Hommay / Alphonse Picard, (lire en ligne). Réédition : Mayenne, Joseph Floch, 1975,« Eudon de Porhoët et Conan IV ducs de Bretagne (1148-1166) » p. 269-280.
  • Eric Borgnis Desbordes, Arthur de Bretagne (1187-1203) L'espoir breton assassiné, Yoran Embanner, 2012, (ISBN 978-2916579-44-3).

Liens externes[modifier | modifier le code]

Voir aussi[modifier | modifier le code]